Philippe des Vents Sauvages, un paysan aux multiples facettes

Par Stéphanie
Stéphanie Degoute

C’est en pleine transformation de confiture de framboises que je retrouve ce matin-là Philippe, des Vents Sauvages, pour préparer son portrait. Un paysan aux multiples facettes, que je vais tenter de présenter de façon (très !) résumée.

Un paysan-reconverti

Après une carrière dans la radiologie en tant que technicien en imagerie médicale, et la naissance de son premier enfant, Philippe a eu un besoin urgent de retour à la terre, et de le faire dans un cadre collectif. Il s’installe alors un peu par hasard dans l’Hérault, dans une communauté de l’Arche, qui était très tournée vers les activités agricoles. Là, c’est autour du maraîchage et des petits fruits qu’il s’implique dans la communauté, qui produit aussi pain et fromage. Ce sera sa première expérience agricole et le commencement d’un long cheminement.

En quittant la communauté en 2001, il s’installe avec sa famille en Aveyron, au pied de la tour de Peyrebrune à Alrance, toujours dans un lieu collectif, plus informel. C’est là que nait petit à petit le projet des Vents Sauvages, accompagné par Laure pour un temps. Statut agricole ou artisanal, pain ou confiture, les questions étaient nombreuses ! Mais sur une petite surface, le choix s’est rapidement tourné vers la seule orientation possible : des petits fruits. Et comme le temps des plantations et des mises à fruits est ce qu’il est, la cueillette sauvage et la transformation se sont vite ajoutées au projet pour démarrer sans attendre.

 

Les premières plantations datent de 2004. En 2005, Philippe se forme au CFPPA de Florac, ce qui lui permet d’affiner son projet. Installé paysan en mars 2006, il démarre avec 7 types de confitures, et un sirop la première année. En fin d’année, c’est sa femme Sloliya qui s’installe avec lui et qui l’accompagne toujours aujourd’hui (conjointe-collaboratrice, elle s’est installée psychopraticienne en 2019). Actuellement, la ferme embauche 2 à 3 salariés pour un volume de 1000 heures par an environ.

Contact

Un paysan-confiturier, donc

La ferme est en plein changement ! Il y a 4 ans, Philippe a eu l’opportunité d’acheter un terrain tout proche de la Tour de Peyrebrune pour y construire un atelier de transformation digne de ce nom, achevé dans les grandes lignes pour y réaliser les transformations de l’année 2018. L’année dernière, lors du premier confinement, une nouvelle opportunité s’est présentée d’acquérir une autre parcelle de 2ha attenante à l’atelier et y installer toutes les cultures. Philippe est donc en pleine période de transition pour replanter ou déplacer les arbustes petit à petit et pour perdre le moins possible en production.

C’est ainsi que les framboisiers, cassissiers, myrtilliers, groseilliers, et rhubarbes vont déménager eux aussi, dans une terre, a priori à qualité égale, mais avec une profondeur beaucoup plus importante, ce qui ne devrait pas déplaire à ces petits arbustes ! Dans 4 ou 5 ans, tout ce petit monde devrait avoir trouver sa place optimale. Avant cela, les sols doivent être préparés (fumier, broyat, …) et le système d’irrigation autonome installé (encore de quoi l’occuper !). Aujourd’hui, Philippe dispose de 6 ha en tout, mais seulement 1,2 sont vraiment « plantables ».

Au quotidien, c’est un travail très rythmé par les saisons qui attend Philippe. Les cueillettes commencent au 15 mai avec la rhubarbe. Vient ensuite la fleur de sureau fin mai pendant 15 jours (et il ne faut pas les rater !). En juillet, c’est la folie : framboise, cassis, groseille, myrtille. La mûre prend rapidement le relais en août, rattrapée par la poire sauvage. Et l’automne s’annonce avec les pommes début octobre, suivies de près par les châtaignes.

L’été, Philippe transforme deux matinées par semaine. Au mois d’août, il passe à quatre matinées. Et ensuite, et en fonction des dernières cueillettes, c’est cinq fois par semaine qu’il transforme, jusqu’à épuisement des stocks autour du 20 janvier environ, et après environ 15000 pots et bouteilles patiemment remplis à la main. Une transformation représente quatre marmites de confitures ou huit de sirops, soit 200 pièces en moyenne.

L’hiver, ce sont les tailles qui occupent les journées jusqu’à la mi-mars environ.

Et cela va sans dire pour Philippe, toute la ferme est certifiée bio, et sous mention Nature & Progrès.

Ses produits sont vendus aux Loco-Motivés depuis le tout début de cette aventure. Vous pouvez aussi les retrouver dans les différentes Biocoop du département, au marché de Montredon…

Un paysan-militant

Très engagé, Philippe s’implique dans plusieurs associations, et ça lui prend une grande partie de son temps, entre les réunions physiques ou virtuelles, les déplacements …

Il a un engagement fort à Nature & Progrès. D’abord au niveau départemental en étant le président du groupe Aveyron, puis au niveau national. Il a été membre du conseil fédéral de 2013 à 2019. Aujourd’hui, il est co-délégué à ce conseil, et reste actif dans des commissions, et notamment un projet de recherche sur la « CO-COnstruction des COnnaissances pour la transition écologique et solidaire ».

Il participe au groupe de travail sur les mentions collectives : qu’est ce qu’une mention collective (d’une coopérative par ex, un GAEC avec plusieurs productions …) et comment une telle mention peut fonctionner ; à celui sur la recherche et accompagnement : pour identifier les besoins en recherche, soit sollicité par des jeunes chercheurs, soit parce qu’il existe des besoins en interne : filière huile de palme, l’utilisation des plastiques et leurs impacts environnementaux, sur les composts, etc.

Et depuis un an, il s’engage dans un second collectif : Secrets Toxiques. Il y est représentant de Nature & Progrès et co-président. Et là aussi, ça prend beaucoup de temps : au moins 3 réunions par semaine ! Si vous ne connaissez pas, et en quelques mots, Secrets Toxiques regroupe une trentaine d’associations et porte des actions en justice pour faire reconnaitre les manquements institutionnels dans la mise sur le marché des pesticides, et notamment des manquements dans les études sur la toxicité et la cancérogénicité à long terme de la formule complète de ces produits.

Un paysan-formateur

Fort de son expérience et de son envie de transmettre, Philippe est régulièrement sollicité en tant que formateur : auprès du CFPPA de la Cazotte, en spécialité petit fruits, auprès de l’APABA, de différents groupements de producteurs bio en initiation à la culture des petits fruits et en transformation des fruits.

Il a également passé l’hiver dernier à rédiger la partie « transformation des fruits » d’un livre pour l’ITAB (l’Institut Technique de l’Agriculture Biologique) qui devrait sortir cet l’hiver sur l’itinéraire technique des petits fruits, des plantations jusqu’à la transformation.

Son portrait chinois : si il était ...

  • Une recette préférée : la confiture de framboise
  • Un produit coup de coeur aux Loco : le fromage de chèvre du Païdol
  • Une couleur : le vert
  • Un super héros : Gandhi
  • Un endroit : la montagne entre les neiges et les estives, entre le rocher et le dernier refuge
  • Un animal : la chouette hulotte
  • Un aliment : les tomates variété ancienne, la rose de Berne en particulier

Un paysan-cavalier

Et temps précieux qu’il se réserve, Philippe s’occupe de son cheval, au moins deux fois par semaine. Peut-être le croiserez-vous un jour au détour des sentiers près de la tour de Peyrebrune …

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